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Arménie/Reportage

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  DIKRAN:  "ON NOUS MENT DEPUIS DIX ANS !"

           

"Soud yen khossoum. Aha dasse dari é arten vor mez khapoum yen. Al ge pavé". Traduction: ils mentent, celà fait dix ans déjà qu'ils nous trompent, il y en a assez !". Ces phrases, prononcées sur un ton de colère, sont celles de Dikran Sarkissian, la quarantaine, habitant dans un quartier populaire du troisième arrondissement (yérort mass) d'Erévan. Ancien ouvrier de l'usine Naïrtié, au chômage depuis près de dix ans, ce père de trois enfants ne croit plus à ceux qui dirigent le pays.

"Tous des voleurs en costume-cravate" reprend Dikran et ajoute sur un ton sec et révolté "ils volent le peuple et mènent la grande vie, tout en donnant l'impression de s'intéresser au malheurs du peuple d'Arménie. Or, ces hommes-là ne font rien. Dans leurs réunions stériles, ils comptent l'argent sale déposé sur leurs comptes en banque. Pendant que le peuple meurt de faim. Ce peuple affamé a perdu toute confiance aux gens qui le dirigent. C'est une véritable catastrophe nationale que subit aujourd'hui notre pays. Pire encore que le génocide, car tout le monde ne songe qu'à une seule chose: quitter au plus vite le pays...".

Croyait-il aux communistes d'avant 1988 ? "Pas plus qu'aux dirigeants actuels" lance Dikran et ajoute "seulement voilà, les communistes d'hier nous donnaient un peu de pain et du travail pour que le peuple ferme les yeux. Or, les membres du gouvernement arménien d'aujourd'hui, volent tout, sans rien laisser au peuple..." reprend Dikran visiblement excédé et amer.

Dikran ne croit plus aux partis politiques d'Arménie. "Entre les communistes, le dachnaks, les républicains et toutes les autres factions politiques présentent au parlement ou au gouvernement, il y a une grande complicité. Ces personnes se connaissent tous, se tutoient et de retrouvent la plupart du temps autour de bureaux ou de tables garnies, pour bavarder et boire quelques verres ensemble. Sans même penser à l'avenir du pays. Pendant ce temps-là, le peule crève de faim et personne s'en inquiète" dit Dikran en serrant très forts ses poings.

N'a-t-il pas songé à quitter le pays ? "Bien évidemment -répond Dikran- j'ai pensé partir m'installer en Russie auprès de mes cousins, ou à Los Angeles, où réside mon frère aîné. Mais pour partir, il faut de l'argent. Beaucoup d'argent. Or, je ne dispose que de dettes. Comment partir ?".

Entre deux petits boulots et quelques dollars d'aide de sa belle-famille, Dikran a beaucoup de mal à joindre les deux bouts et à subvenir aux besoins de sa famille. "Je suis désespéré. Je ne sais plus quoi faire pour m'en sortir. Si cela devait continuer ainsi, je pense que la grande colère du peuple arménien se transformerait en révolte. Une révolte qui pourrait tout emporter..." lancera Dikran.

Un présent difficile, un avenir incertain, des milliers de citoyens arméniens sont comme Dikran, au bord du désespoir. Pour combien de temps encore ?

                           Krikor Amirzayan

                                          Valence - France

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